Le Filet

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Un immense piège en nylon rouge

Les hommes attendent: « Est-ce que les poissons sont dedans ?» Rien n'est moins sûr. Bien que les outils de pêche soient très perfectionnés, les coups nuls sont fréquents. Les Bretons parlent parfois en souriant de l'exemple des Yougoslaves: ils avaient trois senneurs; ils ont été obligés de les désarmer, ils ne prenaient jamais rien, le poisson leur échappait toujours. Le thon est rapide et malin. On a beau être un pêcheur breton expérimenté, il ne suffit pas de jeter le filet pour le remplir. On peut aussi bien réussir un coup de 100 tonnes que remonter un filet vide. Alors, cette fois, un filet plein ou un coup pour rien ?

Un travail de précision

Pour installer le filet, il a suffi de le laisser se déplier dans le sillage à l'arrière du bateau. Pour le remonter, c'est une toute autre affaire. Les anneaux métalliques et les chaines qui lestent le bas du filet sont maintenant suspendus au bout d'un palan. Il faut les enfiler sur un long bras d'acier, le « Canon». Manceuvre difficile, dangereuse. Les hommes sont coiffés de leur casque. Jean-Claude, le bosco, donne dees ordres brefs: « Mollis, laisse aller... Devant les trente-deux poignées de Commande du pupitre, Bernard et Didier font de leur mieux. lls savent que les poulies, les cables et les treuils encaissent des efforts de plusieurs dizaines de tonnes, et qu'une minute d'inattention peut coûter la vie d'un homme. Voilà, les chaînes sont en place sur le canon. L'autre bord, perlé de flotteurs, est engagé sans difficulté jusqu'a la grande poulie du palan, très haut à l'arrière. On peut commencer à remonter le filet.

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Dix-huit hectares à plier

Aspergéés par les gerbes d'eau, les hommes sont maintenant á l'arrière pour replier une partie du filet. Même sous un ciel tropical ensoleillé, ils doivent travailler en ciré! lls sont installés sous la grande poulie qui remonte vers eux l'immense piège de nylon rouge. Les anneaux du fond du filet quittent un à un le canon tandis que les hommes plient méthodiquement la senne, qui devra se dévider sans encombre au prochain largage. Au fur et a mesure que la senne est tirée, tout le poisson se trouve rassemblé, grouillant au fond de la poche qui reste dans l'eau. Il suffit d'aller le cueillir.

Parfois, on prend dans le filet d'autres poissons que des thons, par exemple de gros carnivores, requins ou dauphins. Ils étaient en train de se régaler tranquillement quand l'homme du nid de pie a donné l'alerte. Dans ce cas-là, il faut tout vider sur le pont, faire le tri et renvoyer par-dessus bord tout ce qu'on ne veut pas garder. Du travail supplémentaire! Cette fois-ci, tout va bien, on n'a pris que du thon: on va pouvoir l'envoyer directement du filet à la cale sans avoir à le trier. Il va suffire de remonter le poisson avec une grande épuisette qui porte un drôle de nom: la salabarde. Le poisson glissera dans la cale par toboggan, où il sera gelé.

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